Il est une notion essentielle dans l’apprentissage du hatha yoga qui est celle des vayus, les souffles vitaux.
La connaissance des cinq principaux vayu permet de mieux comprendre le fondement de cette discipline, et d’utiliser les différentes techniques, asana, pranayama et mudra avec plus de justesse….
Revenons pour cela à la notion de prana, l’énergie vitale universelle qui se trouve partout autour de nous.
Prana, c’est le principe de vie, l’essence, la force vitale qui meut et dirige l’univers et que l’on retrouve dans l’air que nous respirons. Mais prana n’est pas l’air, c’est plutôt la vitalité subtile contenu dans l’air.
Au niveau humain, c’est le corps subtil qui en est le réceptacle. Ce corps dit aussi corps énergétique (sukshma sharira) est un corps immatériel, rayonnant, vibrant, constitué de milliers de canaux ou plutôt de méridiens d’énergie .
Ce corps énergétique est constitué de trois enveloppes, dont celle qui nous intéresse ici est nommé pranayama kosha, l’enveloppe faite de prana.
On retrouve à travers l’image du caducée d’Hermès le symbole du corps énergétique.
Plus précisément dans la tradition indienne, il est représenté par un axe central (sushumna), le long duquel s’alignent les 6 centres d’énergie principaux (chakra) et les deux principaux canaux subtils lunaire et solaire (ida et pingala) qui s’entrecroisent dans chaque chakra autour de cet axe.
Le prana va donc circuler à travers ce corps énergétique, pour animer le corps physique et lui donner vie. Il va alors se décliner en 5 vayu (vents , mouvements) principaux qui vont permettre l’existence, le contrôle et la régulation de toutes nos fonctions physiques, mentales et émotionnelles.
Chaque vayu se caractérise par le sens de son mouvement dans le corps, par la zone où il se trouve et par sa fonction majeure.
Les 5 principaux vayu sont :
Prana vayu, le souffle qui va vers l’intérieur
Apana vayu, le souffle qui va vers l’extérieur
Samana vayu, le souffle de l’assimilation ou de l’équilibre
Uddana vayu, le souffle qui va vers le haut
Vyana vayu, le souffle qui fait circuler.
Prana vayu, qui ne faut pas confondre avec le prana, l’énergie vitale qui anime tout l’univers, représente la fonction, le souffle qui nous permet de faire entrer en nous la vie contenue dans le prana. C’est une force aspirante, attractive et centripète.
Prana vayu a son siège dans le thorax, l’appareil respiratoire, et dans le centre d’énergie du cœur, il est en relation avec le mouvement de l’inspiration c’est-à-dire de l’absorption par les poumons de l’énergie cosmique, mais aussi à l’ingestion de la nourriture et du prana contenu dans celle-ci.
On peut ici noter l’importance pour régler ce vayu, de bien respirer et de manger des aliments vivants riches en prana, mais aussi de porter une attention à tout ce que l’on ingère à travers les différentes perceptions sensorielles.
Le chakra du cœur gère le domaine de l’affectif, et si on laisse entrer en nous des émotions négatives et polluantes, c’est tout notre équilibre qui est perturbé. Un bon équilibre de prana vayu est important car il donne force à tous les organes vitaux, il entretient l’aspiration à la vie et au principe divin.
Apana vayu
le souffle qui va vers l’extérieur, qui fait sortir et que l’on assimile à l’expiration a pour fonction principale l’élimination.
C’est la force qui permet de faire sortir du corps tout ce qui n’a plus besoin d’y rester.
C’est une force centrifuge, un mouvement de l’énergie descendante qui est localisée dans le centre d’énergie de la racine, et au niveau du corps physique dans le côlon, le système reproducteur, le système urinaire et le rectum.
Sa fonction principale est l’élimination à travers les selles, les urines et aussi la sueur. Il est la source de l’émission du sperme et du sang menstruel et il réagit l’accouchement.
Lorsque apana est déséquilibré cela peut provoquer de la constipation ou de la diarrhée, des troubles de la sexualité, des troubles menstruels et des douleurs dans le bas du dos.
Sur le plan psychologique, ce déséquilibre se manifeste par des tendances à l’apathie, à la somnolence, une certaine lourdeur d’esprit, une sensation de mal-être et un manque d’énergie.
L’équilibre c’est ni trop ni pas assez.
Une insuffisance, apana ne joue pas pleinement son rôle, le processus d’élimination est paresseux et cela entraîne l’accumulation de toxines.
Un excédent, et apana, l’énergie qui fait descendre est trop prédominante et cela nous tire vers le bas, vers l’inertie, avec un manque notable de vitalité et une accélération des processus de vieillissem*nt.
Un bon fonctionnement nous garantit une bonne santé, grâce à une bonne purification du corps .
Le lien avec le chakra racine nous amène à accepter totalement le processus d’incarnation et nous aide à vivre avec plus de stabilité.
Au niveau du hatha yoga, le geste principal qui règle apana est mula bandha la contraction de la racine.
Samana vayu
Apana le souffle qui fait sortir et prana le souffle qui fait entrer, bien que complémentaires, constituent deux forces opposées et donnent une sensation de dualité.
L’une répand, l’autre condense, l’une tient l’individu dans son animalité par le phénomène de dégradation et d’entropie mis en place par la nature, l’autre maintient dans le conditionnement humain, l’aspiration à la vie et l’agitation émotionnelle qui en découle.
Ces deux forces vont trouver un terrain d’équilibre dans samana le souffle de la digestion, de la cohésion.
La fonction principale de samana est donc l’assimilation.
Situé au niveau du ventre, de manipura chakra, samana joue le rôle de coordinateur entre prana et apana.
C’est lui qui permet la digestion au sens large du terme, car l’être humain a besoin de digérer aussi ses émotions.
On dit aussi que c’est le souffle concentré, qui rassemble, égalise et harmonise, il donne une sensation de cohésion et de centrage.
Dans le processus d’élévation de l’énergie, c’est aussi dans ce feu du ventre, dans cette combustion et purification des tendances animales et psychologiques, que la flamme ascendante va prendre le relais sur la poussée du bas exercée par mula bandha.
Ici grâce à uddiyana bandha, la rétraction du ventre, l’énergie va être tirée vers le haut.
Uddana
souffle d’en haut ou qui va vers le haut.
C’est le vayu relié au centre de la gorge, on le localise dans la gorge et la tête.
Il donne le contrôle du corps à l’esprit, il est responsable de notre capacité à nous tenir debout.
Il permet aussi la parole, la capacité d’expression, l’expression vocale mais aussi l’expression de soi, l’expression artistique. Il gère l’effort, la volonté et l’enthousiasme.
C’est le souffle initiatique où la transmission orale et l’énonciation des mantra trouvent ici leur importance, mais aussi parce que c’est le souffle qui s’échappe par le sommet du crâne et permet d’atteindre la libération (moksha), l‘éveil spirituel.
Les techniques de jalandhara bandha la contraction de la gorge et ujjain, le frottement de l’air dans la gorge, stimulent et règlent le fonctionnement d’uddana vayu.
Vyana
le souffle de l’unité, ou le souffle diffusé est le vayu qui préside au métabolisme et à la circulation au sens large : sang, lymphe, énergie nerveuse, pensée, émotions…
On le dit présent et répandu de façon hom*ogène dans le corps entier dont il maintient la cohésion.
Il prend toutefois sa source dans le centre d’énergie du pubis, svadhisthana chakra, le centre de l’élément eau.
Il donne la force et le mouvement et permet aussi aux autres vayu de fonctionner et de se coordonner.
Dans la tradition du tantrisme du Cachemire, vyana symbolise l’état ultime, celui où la conscience est unie à l’énergie, où tout circule librement… plus aucun nœud, plus aucun blocage ni conditionnement. C’est l’état de l’être délivré, apaisé.
Les techniques qui règlent vyana sont la circulation du souffle dans les nadi ou les chakra, la circulation de la pensée par la prise de conscience de chaque partie du corps en yoga nidra, la méditation et toute sensation d’ouverture de l’espace intérieur.
Pour conclure
nous pouvons dire que les techniques de hatha yoga, et principalement le pranayama appliqué dans les différents asana ou dans la simple posture assise, vont contribuer à réguler le fonctionnement de tous les vayu, à les harmoniser entre eux pour maintenir ou acquérir une bonne santé, un meilleur équilibre et une plus grande joie de vivre …
